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L’invitée : Anne-Laure Porée, journaliste et anthropologue
Le livre : La langue de l’Angkar. Leçons khmères rouges d’anéantissement, Paris, La découverte, 2025.
La discussion :
- Le contexte et la prise du pouvoir par les khmers rouges (1:00)
- S-21, épicentre de la violence du régime (7:00)
- Le « cahier noir », manuel de Duch et de ses tortionnaires (16:00)
- Les « ennemis » des Khmers rouges et ma centralité de l’aveu (29:10)
- Quelles formes de résistance des victimes ? (37:50)
- Comment caractériser la violence des Khmers rouges ? (50:15)
Le conseil de lecture : Rithy Panh, Christophe Bataille, L’élimination (2012)
Le conseil de film : Rithy Panh, Les tombeaux sans nom
Miniature YouTube : cellule, musée de Tuol Sleng, prison S-21. Photo : Bruno Fontana
Télécharger la transcription de l’épisode : https://transcripts.blubrry.com/parolesdhistoire/143067620-51531.srt
Pour supprimer le minutage de la transcription utiliser cet outil en ligne : https://anatolt.ru/t/del-timestamp-srt.html
Habitué du podcast, j’ai été très déçu par cet épisode.
Premièrement – et j’ai très attentivement écouté l’émission pour ne pas être pris en défaut sur ce point – S21 n’est à aucun moment présenté comme une centre de détention et d’interrogation INTERNE à la structure administrative de l’Angkar. Tous les prisonniers envoyés, interrogés et exécutés à S21 sont des responsables Khmers Rouges (même si l’on considère que les enfants les accompagnant sont des victimes collatérales) et ont peu ou prou tous du sang sur les mains. Ce qui rend d’ailleurs particulièrement difficile la visite du mémorial de Tuol Sleng quand on se rend compte éprouver une immense empathie devant les photos de gens qui sont par ailleurs eux-mêmes des génocidaires. Et Mme Porée fait preuve à mon sens de beaucoup d’imprudence en énonçant la spécificité de S21 comme centre dont on ne ressort pas vivant : c’est vrai pour le réseau de Duch, S21 est la prison-terminus. Mais suggérer qu’aucun centre de torture dans les provinces, destiné aux “citoyens ordinaires”, n’ait été un centre de mise à mort systématique est une intuition pour le moins déraisonnable.
Deuxièmement, la perspective ethno-essentialiste du régime est complètement passée sous silence. Alors que la condamnation d’un “esprit vietnamien dans un corps khmer” est une sentence de mort. Je rappelle aussi la continuation de l’invisibilisation du sort des Chams. Quel dommage quand une des questions porte sur caractère génocidaire du régime ; on a là un facteur non négligeable.
Troisièmement, et j’avoue que c’est une remarque un peu minable, j’ai du mal à croire aux compétences linguistiques d’Anne-Laure Porée à sa prononciation du khmer. On ne dit pas “Doutch” pour parler du responsable de S21 mais “Deutch”. D’autres rares mots prononcés dans cet épisode me portent à croire que le travail de traduction est probablement essentiellement le fait de Rithy Panh. Sur ce dernier point, et alors qu’il est facile de vérifier que Mme Porée connaît son travail essentiel dans le domaine de la langue de l’Angkar, il n’est fait aucune mention des travaux de Henri LOCARD ; et ça fait vraiment mal d’entendre qu’elle n’est même pas capable de faire une petite mention de celui-ci à la fin de l’émission. Réelle erreur historiographique.
Enfin, mais ça c’est vraiment la petite pique de l’archiviste, j’aimerais bien qu’on arrête de dire que les chercheurs “trouvent” les documents. Il est vrai que ça arrive mais dans le cas présent, quelle insulte à l’IMMENSE travail de recherche, de tri, de classement et d’inventaire par les Cambodgiens notamment via le DCCAM.
Je continue bien évidemment d’apprécier ce podcast mais cet épisode n’est vraiment pas au niveau, on sent le plan de promotion d’un ouvrage qui apporte peu sur le sujet.