182. Maus dans l’histoire de la BD et l’historiographie de la Shoah, avec Tal Bruttmann

L’invité: Tal Bruttmann, historien, spécialiste de la Shoah

Le livre: Art Spiegelman, Maus, NY, Pantheon Books, 1986-1991

La discussion:

  • La première rencontre avec Maus, à la fin des années 1980 (1:30)
  • La vie d’Art Spiegelman, auteur et éditeur de comics avant Maus (2:50)
  • Le contexte de création de Maus, au moment où le feuilleton Holocauste est diffusé à la télévision américaine (4:30)
  • Un livre d’une grande complexité, à l’opposé de l’« Holokitsch » (7:40)
  • Les recherches préparatoires d’Art Spiegelman, fondées sur des enregistrements de conversations avec son père, et la consultation de dessins et d’ouvrages (10:00)
  • Le dessin, source pour l’histoire, dans ce travail de documentation et pour Ma us (13:00)
  • Les difficultés de publication de Spiegelman (14:00)
  • Les incertitudes de la réception : « fiction » ou « non-fiction » ? quelle légitimité pour la BD comme représentation de l’histoire ? (17:45)
  • Un livre qui n’est pas seulement consacré à la Shoah, mais aussi et surtout sur la transmission familiale, avec une mise en abyme du témoignage, et un récit de « seconde génération »  (22:40)
  • Un trait « tenu » du début à la fin de l’œuvre (26:00)
  • Un livre qui n’embellit pas la réalité ni le témoin (27:00)
  • Un travail qui montre de façon rare les conditions de recueil du témoignage (29:00)
  • Extrait audio : Vladek Spiegelman témoigne (31:00)
  • Le parcours singulier de Vladek et Anja durant la Seconde Guerre mondiale (32:00)
  • Le caractère « transactionnel » de la survie durant la Shoah dans le récit de Vladek Spiegelman (38:00)
  • Les langues de Maus : anglais, allemand, yiddish, polonais… (40:00)
  • Le choix de représenter les Juifs en souris, et le caractère « reconnaissable » des Juifs en Pologne (42:30)
  • La question des choix, et des dilemmes pour les protagonistes dans l’incertitude des protagonistes (45:00)
  • Les choix graphiques de Maus : animaux, bichromie… en lien avec la culture graphique d’Art Spiegelman (48:00)
  • la position particulière de Maus dans les débats sur la représentation de la Shoah, et ses sources visuelles (51:00)
  • la plasiticité du medium BD (57:00)
  • un « avant » et un « après » Maus dans la représentation de la Shoah en BD (1:02:00)
  • Conseils de lecture (1:04:00)

Albums cités dans l’entretien (par ordre chronologique):

  • Pierre-Edmond Calvo, Victor Dancette & Jacques Zimmermann, La Bête est morte ! Fascicule premier. Quand la bête est déchaînée, Paris, Editions GP, 1944
  • Will Eisner, A contract with God : and other tenement stories, New York , Baronet, 1978.
  • Frank Miller, Batman: The Dark Knight Returns, DC Comics, miniseries (4), February-June 1986.
  • Alan Moore & Dave Gibbons, Watchmen, DC Comics, limited series (12) September 1986-October 1987.
  • Joe Kubert, Yossel. April 19, 1943: a story of the Warsaw Ghetto Uprising, New York: Ibooks : Distributed by Simon & Schuster, 2003.

Bibliographie sélective:

  • Tal Bruttmann, « The Holocaust through Comic Books » in Aukje Kluge et Benn E. Williams (eds.), Re-examining the holocaust through literature, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars Pub., 2009, p. 173-200.
  • Mary S. Costanza, The Living Witness: Art in the Concentration Camps and Ghettos, New York, Free Press, 1982.Deborah R. Geis (ed), Considering Maus : approaches to Art Spiegelman’s “Survivor’s tale” of the Holocaust, Tuscaloosa, University of Alabama Press, 2003.
  • Anne Hélène Hoog, Didier Pasamonik et Edward Portnoy, De Superman au Chat du rabbin. Bande dessinée et mémoires juives, Paris, Musée d’art et d’histoire du judaïsme, 2007
  • Serge Klarsfeld (ed.), David Olère: un peintre au sonderkommando à Auschwitz, New York, The Beate Klarsfeld Foundation, 1989.
  • Agnieszka Sieradzka, Le Carnet de croquis d’Auschwitz, Oswiecim, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 2014.
  • Art Spiegelman, Metamaus, Pantheon Books, 2011

Conseils de lecture:

  • José-Luis Bocquet et Arno, Anton Six, Paris, Albin Michel, 1987.
  • Miriam Katin, Seules contre tous, Paris, Seuil, 2006.
  • Greg Pak et Carmine Di Giandomenico, Magneto : Le testament, 2009

138. Histoires de Tintin #12 : Tournesol, Tintin, les sciences et les techniques, avec Jérôme Lambert

L’invité: Jérôme Lambert, maître de conférences en physique à l’Université de Rennes

L’affaire Tournesol, 1956 (c) Hergé / Moulinsart

Le thème: sciences et techniques dans l’œuvre d’Hergé

La discussion:

  • Première partie: images et figures scientifiques
  • Hergé, amateur de science et féru de documentation précise (1’30)
  • Le personnage de Tournesol et ce qui l’a inspiré (5′)
  • Des usages dangereux de la science, mas pas de “savant fou” chez Hergé (11’30)
  • Hergé fasciné par les matériaux, et par une science relevant plus de l’ingénierie que de la recherche fondamentale (16’45)
  • Les manifestations de la nature dans les albums: éclipses, éclair en boule… (19’30)
  • Science et ésotérisme (19’30)
  • La dimension pédagogique des albums (26’30)
  • Enseigner les sciences avec Hergé (29′)
  • Seconde partie: les quatre albums marqués par les questions scientifiques (31’20)
  • L’étoile mystérieuse: météorites, lunette astronomique (et non téléscope comme dit par erreur dans l’émission), calculs… (32′)
  • Objectif Lune, extraordinaire œuvre d’anticipation (41′)
  • On a marché sur la Lune: apesanteur et whisky en boule, paysages lunaires et char (52′)
  • L’affaire Tournesol, l’arme sonore et la fascination d’Hergé pour le verre cassé (1’07)
  • Une éthique de la recherche discutable dans Tintin et les Picaros (1’16)

Bibliographie:

– Sur le personnage de Tournesol, ses prédécesseurs dans Tintin et les personnages réels dont Hergé s’est inspiré :
“Le Tournesol illustré : éloge d’un oublié de l’histoire des sciences”, par Albert Algoud, chez Casterman (1994)
– Les deux extrêmes : l’ingénieur et le savant fou : Jo, Zette et Jocko (Le Manitoba ne répond plus et l’éruption du Karamako), réédition de 1952
– Sur l’astronomie dans Tintin : “Mais où le temple du Soleil ? Enquête scientifique au pays d’Hergé”, par Roland Lehoucq et Robert Mochkovitch, Flammarion (2003)
– Sur l’inspirateur d’Hergé pour les décors de la fusée lunaire : “Alexandre Ananoff, l’astronaute méconnu”, de Pierre-François Mouriaux et Philippe Varnoteaux, Ed2A, 2013.
– Sur le déroulé minutieux des missions Apollo, avec des photos (*) prises sur place :
“Ils ont marché sur la Lune, le récit inédit des explorations Apollo”, par Philippe Henarejos, chez Belin (2018)

137. Écritures alternatives de l’histoire, avec Axelle Brodiez-Dolino et Émilien Ruiz

Les invité-e-s : Axelle Brodiez-Dolino, historienne au CNRS ; Emilien Ruiz, historien à Sciences Po, membres du comité de rédaction de la revue Le Mouvement Social

Le numéro de revue : Le Mouvement Social n° 269-270, 2019/4, « Écrire autrement ? L’histoire sociale en quête de publics » 

La discussion :

  • Présentation de la revue Le Mouvement Social (1’30)
  • Le thème du numéro : écrire l’histoire autrement (BD, théâtre, blogs…) (3’)
  • La nouveauté des formes d’intervention actuelle des historien-ne-s dans l’espace public (8’
  • En lien avec un contexte qui est aussi politique, avec des usages réactionnaires de l’histoire (10’45)
  • Les questions méthodologiques (histoire comme travail de la preuve), au cœur des enjeux politiques (12’45)
  • Les injonctions paradoxales des institutions et des pairs vis-à-vis des interventions dans l’espace public : encouragées (14’) sans être toujours valorisées (17’30), avec des obstacles notamment juridiques (19’)
  • Le plaisir et l’intérêt de ces écritures alternatives, avec la rencontre d’un public plus vaste (20’30)
  • La notion d’histoire publique, qui permet en partie de poser ces enjeux, mais aussi les problèmes qu’elle pose (22’30)
  • Les questions de statut, de légitimité, de reconnaissance pour les collègues qui tentent ces écritures alternatives (28’)
  • Le rôle du web, des réseaux sociaux, de Wikipedia dans ces évolutions (29’30)
  • Quelle réception de ces pratiques, quelle efficacité, quantitative et qualitative ? (35’)
  • Quelle place pour les émotions dans ces pratiques, et quel enrichissement pour les historien-ne-s ? (38’)
  • La catégorie « histoire populaire » et ce qu’elle dit, par son relatif succès, des écritures alternatives de l’histoire et de leur réception (42’)
  • Qui « nous » lit ? (48’)

Schéma de Lisa Gilbert diffusé sur Twitter puis auprès de la American Historical Association.

Ajout du 28 août 2020:schéma traduit et adapté par André Loez

 

132. Histoires de Tintin #8 : Hergé, la politique, la Seconde Guerre mondiale, avec Benoit Peeters

L’invité : Benoît Peeters, biographe d’Hergé

Le thème : Hergé et son attitude politique autour de la Seconde Guerre mondiale

La discussion :

  • Une question longtemps brûlante, et centrale, quand on s’intéresse à Hergé (1’15)
  • Les rapports entre Hergé et le leader du mouvement Rex, Léon Degrelle (3’15)
  • Raymond De Becker, personnage clef, « mentor » d’Hergé et « non-conformiste » des années 1930 glissant vers la droite (7’)
  • Un Hergé sans positions politiques affirmées, sinon le monarchisme et le neutralisme (12’20)
  • Hergé sous l’uniforme durant la « drôle de guerre » (15‘30)
  • Le choix d’Hergé rejoignant Le Soir sous l’occupation (18’20)
  • Le Soir « volé » et ses conditions de parution (19’50)
  • Une dimension antisémite explicite dans L’Etoile mystérieuse (23’50)
  • Hergé voulant vivre en retrait du monde, et construire par ses récits une temporalité alternative (29’15)
  • L’occasion manquée de quitter Le Soir en 1943, pour un auteur qui reste fondamentalement un homme de presse (34’40)
  • Les difficultés considérables – morales, psychologiques, judiciaires – d’Hergé à la Libération (38’35)
  • Les échos de ces difficultés dans les récits de Tintin (45’50)
  • Reste-t-il des choses à apprendre sur cette période ? (50’40)

110. Watchmen, l’envers de l’histoire américaine, avec Tal Bruttmann

L’invité : Tal Bruttmann, historien

Les œuvres: le comic Watchmen (Alan Moore, 1985) et la série du même nom (Damon Lindelof, HBO, 2019)

La discussion :

  • Pourquoi, en historiens, s’intéresser à Watchmen ? D’abord un tournant au milieu des années 1980 dans l’histoire du comic / de la BD
  • Une série dessinée qui casse le mythe du super-héros et questionne la notion de justice, et des masques sous lesquels on l’exerce
  • Un comic qui prend place dans une chronologie alternative, où les États-Unis ont remporté la guerre du Vietnam
  • Le contexte des années 1980 et la menace de la guerre nucléaire planant sur la série dessinée
  • La façon dont Watchmen intègre le motif de l’horloge (Doomsday clock)et du temps dans sa narration et ses choix graphiques
  • Lé série télévisée créée par Damon Lindelof, et son choix de transposer l’œuvre plutôt que de l’adapter
  • La violence raciale, enjeu frontalement affronté par Watchmen version 2019
  • La scène d’ouverture : le massacre racial de 1921 à Tulsa (Oklahoma), et la façon d’en faire l’histoire
  • Les contextes multiples de ce massacre, inscrit dans la moyenne durée des violences racistes, du lendemain de la Première Guerre mondiale, et dans un lieu spécifique, l’Oklahoma
  • L’intégration de la Shoah au propos de la série
  • Le pogrom de Tulsa comme point de départ narratif des neuf épisodes
  • Le nazisme américain à l’orée de la Seconde Guerre mondiale
  • D’autres enjeux historiques et sociaux propres aux États-Unis : les armes à feu et les drogues
  • Le propos très subtil de la série sur la mémoire, la « nostalgie » et l’histoire

Pour aller plus loin :

  • Le comic watchmen
  • Mémoire universitaire sur Watchmen
  • interview de Damon Lindelof
  • Article sur le pogrom de Tulsa
  • Site de HBO
  • Farid Ameur Le Ku Klux Klan, Paris, Hachette / Pluriel, 2016
  • Caroline Rolland Diamond, Black America. Une histoire des luttes pour l’égalité et la justice (XIXe-XXIe), Paris, La découverte, 2019.