300. Difficiles nuits de noces au XIXe siècle, avec Aïcha Limbada

L’invitée : Aïcha Limbada, membre de l’Ecole française de Rome, docteure en histoire

Le livre : La nuit de noces. Une histoire de l’intimité conjugale, Paris,

La discussion :

  • Introduction (00:00)
  • Les sources permettant d’accéder à l’intimité conjugale (2:00)
  • Des jeunes femmes arrivant parfois au mariage sans aucune notion de ce qu’est un rapport sexuel (10:00)
  • À l’inverse, des « demi-vierges » qui font peur (15:30)
  • La notion de viol conjugal, déjà une préoccupation au XIXe siècle (18:00)
  • Extrait : George Sand, lettre à Hippolyte Chatiron, février 1843 (20:15)
  • Des femmes de milieux populaires plus familières de questions sexuelles ? (20:00)
  • Quel dialogue avec la démographie historique ? (23:00)
  • Le recul des rituels traditionnels de la nuit de noces (27:00)
  • Les modèles de comportements masculins (35:00)
  • Au cœur de l’intimité des époux (39:00)
  • Le désir féminin, grand absent (44:00)

Le conseil de lecture : Martine Sévegrand, Le sixième commandement, L’Église catholique et la morale sexuelle (France- XXe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2023.

295. Histoires de célibats, avec Juliette Eyméoud et Claire-Lise Gaillard

Les invitées: Juliette Eyméoud, docteure en histoire moderne ; Claire-Lise Gaillard, docteure en histoire contemporaine

Le livre: Histoire de célibats, Paris, PUF, 2023.

La discussion:

  • Introduction (00:00)
  • Un livre inscrit dans des questionnements contemporains sur la famille et le couple (2:30)
  • échanges entre moderniste et contemporanéiste (6:30)
  • Le célibat, données objectives et expériences subjectives (9:30)
  • Définir le célibat, une catégorie qui se construit au XVIIIe siècle (13:20)
  • Les enjeux économiques du célibat et du mariage (17:00)
  • Les mêmes questions pour les élites et les couches populaires? (24:45)
  • Célibat et questions religieuses (28:00)
  • L’âge du célibat, et la discordance homme / femme que cela recouvre (31:45)
  • Célibat et capacité d’agir féminine (34:45)
  • Célibat et résignation (39:00)
  • Célibat et vocation religieuse (41:00)
  • Célibat et peur du mariage (44:45)

Les références et conseils de lecture:

  • Nino Haratischwili La huitième vie
  • Céline Bessiere, Sibylle Gollac, Jeanne Puchol, Le Genre du capital. Enquêter sur les inégalités dans la famille, Delcourt, 2023.

248. Passé familial, enquête historienne, avec Camille Lefebvre

L’invitée : Camille Lefebvre, directrice de recherche au CNRS

Le livre : À l’ombre de l’histoire des autres, Paris, éditions de l’EHESS, 2022.

La discussion :

  • Introduction (00 :00)
  • À l’ombre de l’histoire familiale (1:00)
  • Un livre faisant suite à des enquêtes historiennes et familiales de plus en plus nombreuses (2:30)
  • Une démarche qui teste les limites du travail historique (6:00)
  • Les différentes strates de documentation et leurs ambiguïtés (8:00)
  • Les paradoxes du vrai et du faux des archives officielles et familiales (12:00)
  • Extrait : portrait de Mariano Peña Hernando, lu par Anna Kubišta (17:00)
  • Les surprises documentaires et biographiques en cours d’enquête (18:30)
  • Un rapport au passé intense à la génération des parents (26:30)
  • La question des langues, transmises ou non transmises, au cœur de l’enquête (28:00)
  • Une enquête nourrie par l’entraide et l’apprentissage d’autres historiographies (31:00)
  • Quatre familles confrontées à des logiques brutales de modernisation dans le dernier tiers du XIXe siècle (33:00)
  • Les rapports familiaux à la judéité et au communisme, longtemps très structurants (36:15)
  • Peut-on avoir peur de ce qu’on va trouver aux archives ? (41:00)

Les références citées dans l’émission :

  • Ivan Jablonka, Histoire des grands-parents que je n’ai pas eus, Paris, Seuil, 2012.
  • Mark Mazower, Ce que mon père n’a pas dit. Un passé russe, Paris, Seuil, 2021.
  • Daniel Mendelsohn, Les disparus, Paris, Flammarion, 2007.
  • Stéphane Audoin Rouzeau, Quelle histoire ! Un récit de filiation (1914-2014), Paris, EHESS-Gallimard-Seuil, 2013.
  • Jonathan Safran Foer, Tout est illuminé, 2003

Les conseils de Camille Lefebvre :

  • Collection « aparté » des éditions de l’EHESS
  • Jonathan Safran Foer, Tout est illuminé
  • Ruth Zylberman, 209 rue Saint-Maur, Paris Xe. Autobiographie d’un immeuble, Paris, Seuil, 2020 ; adapté du documentaire Les Enfants du 209 rue Saint-Maur

182. Maus dans l’histoire de la BD et l’historiographie de la Shoah, avec Tal Bruttmann

L’invité: Tal Bruttmann, historien, spécialiste de la Shoah

Le livre: Art Spiegelman, Maus, NY, Pantheon Books, 1986-1991

La discussion:

  • La première rencontre avec Maus, à la fin des années 1980 (1:30)
  • La vie d’Art Spiegelman, auteur et éditeur de comics avant Maus (2:50)
  • Le contexte de création de Maus, au moment où le feuilleton Holocauste est diffusé à la télévision américaine (4:30)
  • Un livre d’une grande complexité, à l’opposé de l’« Holokitsch » (7:40)
  • Les recherches préparatoires d’Art Spiegelman, fondées sur des enregistrements de conversations avec son père, et la consultation de dessins et d’ouvrages (10:00)
  • Le dessin, source pour l’histoire, dans ce travail de documentation et pour Ma us (13:00)
  • Les difficultés de publication de Spiegelman (14:00)
  • Les incertitudes de la réception : « fiction » ou « non-fiction » ? quelle légitimité pour la BD comme représentation de l’histoire ? (17:45)
  • Un livre qui n’est pas seulement consacré à la Shoah, mais aussi et surtout sur la transmission familiale, avec une mise en abyme du témoignage, et un récit de « seconde génération »  (22:40)
  • Un trait « tenu » du début à la fin de l’œuvre (26:00)
  • Un livre qui n’embellit pas la réalité ni le témoin (27:00)
  • Un travail qui montre de façon rare les conditions de recueil du témoignage (29:00)
  • Extrait audio : Vladek Spiegelman témoigne (31:00)
  • Le parcours singulier de Vladek et Anja durant la Seconde Guerre mondiale (32:00)
  • Le caractère « transactionnel » de la survie durant la Shoah dans le récit de Vladek Spiegelman (38:00)
  • Les langues de Maus : anglais, allemand, yiddish, polonais… (40:00)
  • Le choix de représenter les Juifs en souris, et le caractère « reconnaissable » des Juifs en Pologne (42:30)
  • La question des choix, et des dilemmes pour les protagonistes dans l’incertitude des protagonistes (45:00)
  • Les choix graphiques de Maus : animaux, bichromie… en lien avec la culture graphique d’Art Spiegelman (48:00)
  • la position particulière de Maus dans les débats sur la représentation de la Shoah, et ses sources visuelles (51:00)
  • la plasiticité du medium BD (57:00)
  • un « avant » et un « après » Maus dans la représentation de la Shoah en BD (1:02:00)
  • Conseils de lecture (1:04:00)

Albums cités dans l’entretien (par ordre chronologique):

  • Pierre-Edmond Calvo, Victor Dancette & Jacques Zimmermann, La Bête est morte ! Fascicule premier. Quand la bête est déchaînée, Paris, Editions GP, 1944
  • Will Eisner, A contract with God : and other tenement stories, New York , Baronet, 1978.
  • Frank Miller, Batman: The Dark Knight Returns, DC Comics, miniseries (4), February-June 1986.
  • Alan Moore & Dave Gibbons, Watchmen, DC Comics, limited series (12) September 1986-October 1987.
  • Joe Kubert, Yossel. April 19, 1943: a story of the Warsaw Ghetto Uprising, New York: Ibooks : Distributed by Simon & Schuster, 2003.

Bibliographie sélective:

  • Tal Bruttmann, « The Holocaust through Comic Books » in Aukje Kluge et Benn E. Williams (eds.), Re-examining the holocaust through literature, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars Pub., 2009, p. 173-200.
  • Mary S. Costanza, The Living Witness: Art in the Concentration Camps and Ghettos, New York, Free Press, 1982.Deborah R. Geis (ed), Considering Maus : approaches to Art Spiegelman’s “Survivor’s tale” of the Holocaust, Tuscaloosa, University of Alabama Press, 2003.
  • Anne Hélène Hoog, Didier Pasamonik et Edward Portnoy, De Superman au Chat du rabbin. Bande dessinée et mémoires juives, Paris, Musée d’art et d’histoire du judaïsme, 2007
  • Serge Klarsfeld (ed.), David Olère: un peintre au sonderkommando à Auschwitz, New York, The Beate Klarsfeld Foundation, 1989.
  • Agnieszka Sieradzka, Le Carnet de croquis d’Auschwitz, Oswiecim, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, 2014.
  • Art Spiegelman, Metamaus, Pantheon Books, 2011

Conseils de lecture:

  • José-Luis Bocquet et Arno, Anton Six, Paris, Albin Michel, 1987.
  • Miriam Katin, Seules contre tous, Paris, Seuil, 2006.
  • Greg Pak et Carmine Di Giandomenico, Magneto : Le testament, 2009

174. Femmes et familles du Quattrocento, avec Christiane Klapisch-Zuber

L’invitée : Christiane Klapisch-Zuber directrice d’études honoraire à l’EHESS

Le livre : Mariages à la florentine. Femmes et vie de famille à Florence (XIVe-XVe siècle), Paris, EHESS / Gallimard / Seuil, coll. « Hautes études », 2020.

La discussion :

  • Un parcours de recherche orienté par Fernand Braudel, de l’histoire économique et sociale vers l’anthropologie historique  (1’10)
  • Un travail fondamental sur le catasto florentin (3’20)
  • Les gisements documentaires extraordinaires de la ville (4’15)
  • L’accès aux familles patriciennes comme à des couches sociales plus modestes (5’)
  • Contrastes et différences entre Florence et Venise (6’15)
  • Le recueil d’articles construit comme un livre ordonné, montrant la vie des femmes mariées (8’20)
  • La notion de « marché matrimonial » à Florence au XVe siècle (9’25)
  • Les calculs familiaux, destinés à marier ou à vouer à l’Église certains enfants (10’40)
  • Des mariages célébrés devant le notaire, plus que devant l’Église (13’30)
  • La dot, clé des relations sociales et matrimoniales (15’15)
  • Le sens à donner aux images de femmes parées et habillées, dans l’iconographie (18’15)
  • Les choix des épouses par leurs futures belles-mères (20’30)
  • Les cycles de vie particuliers des marchands florentins (23’)
  • La chambre nuptiale, ses objets, ses représentations (24’45)
  • Le nombre de naissances, l’importance de la mortalité infantile (27’50)
  • Quels sentiments familiaux, envers les enfants ? (30’)
  • Quel statut pour une veuve, et son « matrimoine » dans la société florentine ? (32’)
  • Quelle transmission du nom par les femmes ? (35’40)
  • La sépulture des femmes et ses enjeux (37’30)
  • Que voir, à Florence, comme traces de cette histoire ? (39’)

Entretien avec Didier Lett retraçant la carrière de Christiane Klapisch-Zuber

Bibliographie et références citées dans l’émission

  • Bellavitis, Anna, « Dot et richesse des femmes à Venise au XVIe siècle », Clio, HFS, 6, 1998, p. 91-100.
  • Chabot, Isabelle, La dette des familles. Femmes, lignage et patrimoine à Florence aux XIVe et XVe siècles, Ecole française de Rome, 2011, coll. de l’EFR 445.
  • Chabot, Isabelle & Anna Bellavitis, « A proposito di ‘Men and Women in Renaissance Venice’ di Stanley Chojnacki », Quaderni storici,  2005, p. 203-238.
  • Frugoni, Chiara, Une journée au Moyen âge, Paris, Les Belles lettres, 2013.
  • Guglielmotti, Paola (dir.), Donne, famiglie e patrimoni a Genova e in Liguria nei secoli XII e XII, Gênes, Società Ligure di storia patria, 2020.
  • Kirshner, Julius, « Pursuing honor while avoiding sin. The Monte delle doti of Florence », Milano, Giuffrè, 1977.
  • Lett, Didier, L’enfant des miracles. Enfance et société au Moyen Âge (XIIe-XIIIe s.), Paris, Aubier, 1997.
  • Molho, Anthony, Marriage alliance in late medieval Florence, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 1994.

Texte de Dante cité à la fin de l’émission

Dante Alighieri, La divine comédie, t. III, Le Paradis, chant XV, v. 97-108, Paris, Flammarion, 1990, trad. Jacqueline Risset. Dante rencontre son trisaïeul Cacciaguida qui lui loue l’état de Florence au XIIe siècle :

« Florence en son antique enceinte

où elle sonne encore la tierce et la none,

était en paix, sobre et pudique.

Elle n’avait ni habits brodés ni ceinture

qui fussent plus à voir que la personne.

La fille, en naissant, ne faisait pas encore

peur à son père, car l’âge et la dot

ne dépassaient ni l’un ni l’autre la mesure.

Elle n’avait pas de maison sans familles,

on n’y rencontrait pas encore Sardanapale,

pour montrer ce qui est permis en la chambre. »

Inscription citée à la fin de l’émission

Epitaphe, Florence, Santa Maria Novella

« Heic jacet in requie Domini/ Septima puella ornatissima/ ***mi de Rubeis Melocchiis patr. pist.  eq. Steph./ et Felicis Mazzettiae flor.  f. /quae virile ingenium studio adepta/ annum agens secundum supra vigesimum/ diuturna hidatidi abdominali ingruente/dum ferrum a quo spes erat salutis/ sensit in sui perniciem conversum/ constans animi et religione potens/ e vita migravit/ III non. Octob. a. r. s. CIϽIϽCCCVII »

Traduction : « Ici repose dans le Seigneur la septième fille très distinguée de ****mo dei Rossi Melocchi son père, chevalier pistoiais de [l’ordre de] Saint-Etienne, et de Felice Mazzetti de Florence, laquelle — ayant acquis par l’étude une intelligence virile, [mais] attaquée à l’âge de vingt-deux ans par une hytadis (infection ?) abdominale persistante, quand le fer où résidait l’espoir de son salut devint sa perte — quitta cette vie le 3 des nones d’octobre 1807. »

*NB : inscription partiellement illisible

112. Quarante ans d’histoire italienne: Nos meilleures années, avec Elisa Vial

L’invitée : Elisa Vial, étudiante en histoire

Le film : La meglio gioventu (Nos meilleures années) de Marco Tullio Giordana (2003)

La discussion :

  • Une fresque historique émouvante racontant cinquante ans d’histoire italienne (2’)
  • Le parcours du personnage principal, le psychiatre Nicola Carati, qui incarne un tournant dans la prise en charge de la maladie mentale, en lien avec Michel Foucault et Franco Basaglia (7’)
  • La représentation des hôpitaux psychiatriques comme lieux d’incarcération, et à l’inverse la volonté des réformateurs de traiter les patients comme des personnes (11’)
  • Les tensions sociales à Turin au début des années 1970 (13’30)
  • La façon dont le film illustre les clivages nord-sud en Italie (16’)
  • La représentation des Brigades rouges (18’)
  • La violence de la mafia et la corruption politique (21’)
  • La famille comme cadre social in fine valorisé sans être idéalisé (28’)

35. Contraception interdite dans la France des années 1950, avec Danièle Voldman et Annette Wieviorka

Les invitées : Danièle Voldman et Annette Wieviorka, directrices de recherche au CNRS

Le livre : Tristes grossesses. L’affaire des époux Bac (1953-1956), Paris, Seuil, 2019.

La discussion : présentation rapide de l’affaire des époux Bac (1:00) et des origines de cette recherche ; le contexte des années 1950 et d’un drame familial lié à une forme de misère sociale (6:10) ; un « drame du Baby-Boom » (Annette Wieviorka) ; retour sur la loi de 1920 qui interdisait la contraception et sa « propagande » et renforce la répression de l’avortement (11:55) ; les failles des pratiques contraceptives à l’époque (14:05) ; les avancées d’autres pays en la matière, et le parcours de la gynécologue Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé (16:00) ;  des procès qui révèlent une justice plutôt équilibrée, et soucieuse de ne pas dédouaner le mari de ses responsabilités (18:45) ; le parcours carcéral des époux (21:25) ; un arrière-plan à l’affaire : le catholicisme encore enraciné dans la France des années 1950 (23:05) ; la convergence conservatrice en matière de contraception du monde médical, de l’Église catholique, mais aussi du parti communiste (25:50) ; le rôle du journaliste Jacques Derogy au sein du petit cercle qui commence à militer en faveur de la contraception, et à porter l’affaire sur la place publique dans les pages de Libération en 1955 (28:15) ; la naissance de l’association Maternité heureuse dans la foulée (31:00) ; les ressemblances et différences entre les contextes de cette affaire et de la loi Veil sur l’IVG en 1975 (34:15) ; le parcours de l’enquête et les difficultés liées aux sources parfois introuvables et aux dérogations pour consulter les archives (37:00) ; la dimension personnelle du travail et le fait d’avoir en partie vécu à la même période que cette affaire (42:55) ; l’écho du  film d’Henri Verneuil avec cette enquête (45:15).

Le conseil de film : Des gens sans importance d’Henri Verneuil (1956)